COMMUNIQUÉ

Laval, le 20 juillet 2018. – Alors que vous êtes assis sur sa chaise, un coiffeur délaissant son peigne pour une brosse à dents vous offre un petit nettoyage moyennant un léger supplément. Vous hésitez, pourquoi ?

Pourtant, chaque jour au Québec, des spécialistes du toilettage pour animaux s’improvisent aussi spécialistes des dents et proposent à leur clientèle d’ajouter au nettoyage du poil et des oreilles celui des dents !

Un geste peu anodin
Après tout, n’est-ce pas à la portée de tous de prendre une curette de métal et de gratter l’émail des canines ou des molaires pour enlever le tartre accumulé? Quel danger peut-il y avoir – hormis celui bien sûr de se faire mordre ! – à effectuer un geste aussi anodin ? En fait, si cet acte avait si peu de conséquences, on trouverait partout en pharmacie des curettes dentaires à utiliser pour nous-mêmes ou pour nos animaux !

Dans les faits, ce type de « nettoyage » a plusieurs impacts. Tout d’abord, le grattage de l’émail produit des microsillons qui seront à l’origine d’une rapide colonisation bactérienne et d’une reformation de plaque dentaire, suivie du développement de tartre. C’est pourquoi il est essentiel de procéder à un bon polissage de la dent à la suite du détartrage. Sur le coup, vous aurez l’impression que la dent est beaucoup plus propre, mais à moyen terme, vous constaterez que le tartre revient beaucoup plus vite sans polissage. Vous aurez ainsi mis le doigt, ou, si vous préférez, la dent (!) dans un engrenage sans fin.

De plus, vous aurez un faux sentiment de sécurité en vous imaginant que, suite au nettoyage, tout va bien pour votre animal. Mais qui vous informera si votre chien souffre de gingivite ou de parodontite (inflammation et infection de l’ensemble des éléments qui soutiennent la dent)? D’un abcès dentaire? D’hyperplasie de la gencive? De tumeurs, de fracture dentaire, d’exposition de la pulpe ou de malocclusion? Toutes ces pathologies nécessitent des soins rapides et précis afin de réduire la souffrance de votre animal et éviter qu’un « simple problème » de dent ne dégénère en une pathologie beaucoup plus sérieuse. En fait, peu de propriétaires savent que 85 % des chiens et 70 % des chats développeront une maladie parodontale avant l’âge de trois ans.

Les soins dentaires professionnels doivent inclure un nettoyage complet (détartrage et polissage) sous anesthésie générale. Le tartre est retiré de façon sécuritaire et efficace sur toutes les portions visibles de la dent et sous la gencive. L’accumulation de plaque et de tartre sous la gencive est le plus important facteur d’inflammation. Lors d’un détartrage sans anesthésie, il est impossible de nettoyer toutes les surfaces de chaque dent ainsi que l’espace se trouvant sous la gencive. Le détartrage de la surface visible de la dent est plutôt esthétique; il est inefficace dans le traitement de la maladie.

Une question de sécurité
Le tartre dentaire se fixe fermement à la surface des dents; certains des instruments nécessaires pour déloger le tartre utilisent des ultrasons sous un jet d’eau, tandis que d’autres ont des extrémités pointues ou tranchantes. Ainsi, le moindre mouvement de l’animal peut entraîner des blessures, autant à l’animal qu’à la personne effectuant le détartrage, en plus de représenter des risques de morsures. Ces procédures peuvent également causer de grandes douleurs chez les animaux atteints de gingivite ou de maladies parodontales et les rendre craintifs. L’anesthésie permet donc d’éviter ces risques. Par ailleurs, l’intubation trachéale de l’animal sous anesthésie protège ses voies respiratoires contre différentes substances et particules qui pourraient accidentellement s’y glisser pendant les soins.

Avant tout le bien-être de l’animal
Les animaux atteints de maladies orales ressentent de l’inconfort et parfois des douleurs importantes. Bien que les symptômes soient dans certains cas silencieux pour les propriétaires, ils peuvent aussi être responsables d’une diminution, voire d’un arrêt de la prise alimentaire, d’irritabilité, d’une perte d’entrain et de changements de comportement notables chez l’animal. Les soins dentaires peuvent améliorer significativement la qualité de vie des animaux qui en bénéficient.

Au moment d’une procédure sans anesthésie, la contention nécessaire pour détartrer un animal accentue le stress et la douleur. L’anesthésie générale permet de réduire ce stress. Le vétérinaire peut également procurer l’analgésie, si nécessaire, qui soulagera l’animal pendant et suivant la procédure.

En toute légalité
Le détartrage est un acte vétérinaire, qui ne peut être effectué que par ou sous la supervision d’un médecin vétérinaire membre de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec. Tout détartrage fait en partie ou complètement hors de ce contexte professionnel est illégal. Aussi, l’administration d’un sédatif ou d’un anesthésiant par un individu non qualifié peut s’avérer très dangereuse pour la santé de l’animal.

En conclusion
Afin d’améliorer la santé dentaire des animaux de compagnie, l’AMVQ recommande aussi d’instaurer, dès le plus jeune âge, des soins dentaires à la maison comme le brossage quotidien des dents. Chaque animal devrait bénéficier d’un examen général annuel par un médecin vétérinaire qui inclut une évaluation de la santé dentaire ainsi que la mise en place des mesures préventives appropriées, souvent un juste équilibre entre les soins dentaires professionnels et ceux faits à la maison.

Source : Association des médecins vétérinaires du Québec en pratique des petits animaux.